L'Autorité de régulation des télécommunications,
Vu le code des postes et télécommunications, notamment ses articles L. 34-8, L. 36-8 et R. 11-1 ;
Vu la décision no 99-528 de l'Autorité de régulation des télécommunications, en date du 18 juin 1999, portant règlement intérieur ;
Vu l'arrêté du 12 décembre 2000 modifié autorisant la société MFS Communications SA à établir et exploiter un réseau de télécommunications ouvert au public et à fournir le service téléphonique au public ;
Vu l'arrêté du 12 mars 1998 autorisant la société France Télécom à établir et à exploiter un réseau de télécommunications ouvert au public et à fournir le service téléphonique au public ;
Vu la décision no 2000-1328, en date du 15 décembre 2000, complétant la décision no 2000-813 en date du 28 juillet 2000 établissant pour 2001 la liste des opérateurs exerçant une influence significative sur un marché des télécommunications ;
Vu la décision no 2001-750 de l'Autorité, en date du 25 juillet 2001, établissant pour 2002 la liste des opérateurs exerçant une influence significative sur le marché du service téléphonique fixe et celui des liaisons louées ;
Vu la décision no 2002-146 de l'Autorité, en date du 12 février 2002, approuvant le chapitre 8 relatif au service d'interconnexion des liaisons louées de l'offre technique et tarifaire d'interconnexion de France Télécom pour les exploitants des réseaux ouverts au public L. 33-1 pour l'année 2002 ;
Vu l'avis no 99-967 de l'Autorité, en date du 5 novembre 1999, sur la décision tarifaire de France Télécom no 99-158 E relative à l'évolution des tarifs de liaisons louées nationales et l'avis no 01-48 du 10 janvier 2001 sur la décision tarifaire de France Télécom no 2000-400 relative aux tarifs des liaisons louées à 34 et 155 Mbit/s ;
Vu la demande de règlement d'un différend enregistrée le 13 août 2001, présentée par la société MFS Communication, RCS Paris no B 398 517 169, dont le siège social est situé 21, rue Balzac, 75008 Paris, représentée par M. Thomas Marten, directeur des affaires réglementaires ;
Le différend porte sur les conditions tarifaires et techniques des prestations de liaisons louées de courte distance et de débits compris entre 64 kbit/s et 155 Mbit/s de l'offre de France Télécom pour les opérateurs.
Dans sa saisine, MFS Communications SA (ci-après dénommé MFS) demande à l'Autorité :
- de dire, d'une part, que les liaisons louées aux opérateurs de courte distance (jusqu'à 50 kilomètres) et de débits compris entre 64 kbit/s et 155 Mbit/s constituent des prestations d'interconnexion lorsqu'elles sont fournies par France Télécom à un exploitant de réseau ouvert au public pour raccorder le site d'un client audit réseau ;
- qu'à ce titre leurs tarifs doivent être orientés vers les coûts pertinents de l'interconnexion, et en particulier vers les CMILTs de l'opérateur historique ;
- de fixer pour l'année 2002 des tarifs correspondant au tableau produit dans la saisine, éventuellement augmentés d'un mark-up de 10 %, et pour 2001, de façon rétroactive, des prix équivalents aux prix publics du catalogue, diminués de moitié ;
- d'ordonner le gel des engagements de qualité de service à leur niveau antérieur à la modification unilatérale des contrats par France Télécom ;
- d'ordonner à France Télécom de proposer une offre d'interconnexion spécifique de liaisons louées aux opérateurs, dont MFS précise les caractéristiques en annexe de sa saisine.
Sur le contexte juridique :
MFS indique que, au titre de la directive 97/33 /CE explicitée par le projet de recommandation relative aux liaisons louées aux opérateurs de la Commission de décembre 1999, il apparaît que les liaisons louées de courte distance fournies par les opérateurs historiques, destinées à compléter le réseau des opérateurs tiers, relèvent du régime de l'interconnexion. MFS cite à l'appui de ses arguments l'interprétation de l'OFTEL dans sa décision de décembre 2000 ;
MFS ajoute qu'en France le régime des liaisons louées aux opérateurs relève notamment de l'article D. 99-9 du code des postes et télécommunications qui place les services d'interconnexion au même rang que les services d'interconnexion de trafic commuté. De plus, MFS se fonde sur l'avis no 99-967 de l'Autorité en date du 5 novembre 1999, dans lequel l'Autorité indique qu'elle est compétente pour traiter des litiges relatifs aux prestations de liaisons louées entre opérateurs, au titre des articles L. 34-8-II et L. 36-8 du code des postes et télécommunications ;
MFS estime que, conformément à l'article D. 99-17 de ce même code, le tarif des liaisons louées d'interconnexion doit être orienté vers les coûts au sens de l'interconnexion, ce qui exclut notamment les coûts commerciaux.
Sur le contexte économique :
MFS reconnaît que le marché des liaisons louées de longue distance est aujourd'hui concurrentiel. En revanche, elle estime que France Télécom exerce encore un quasi-monopole sur le marché des liaisons louées de courte distance en dehors de Paris intra-muros et du quartier de La Défense, car les liaisons louées s'appuient sur le réseau de desserte de France Télécom, y compris la boucle locale. Le recours aux liaisons louées de France Télécom est ainsi indispensable pour parcourir le « dernier kilomètre », même dans les villes où les opérateurs construisent leurs propres boucles optiques.
MFS considère que jusqu'à présent France Télécom n'a pas respecté la réglementation relative à l'interconnexion en ce qui concerne les liaisons louées : les opérateurs ont en effet accès à ces services au même tarif que les clients finals, et même à des tarifs supérieurs, compte tenu des importantes réductions au volume dont peuvent bénéficier les plus gros clients. Or, MFS soutient que le principe selon lequel un opérateur peut se fournir auprès de France Télécom « à un prix fortement inférieur au prix de détail » a été reconnu par l'Autorité dans sa recommandation du 25 juillet 2001 et en dehors même du cadre de l'interconnexion stricto sensu dans sa décision no 2001-253 du 2 mars 2001.
Sur le caractère raisonnable de sa demande :
MFS estime que l'offre de France Télécom pour les liaisons louées aux opérateurs, constituée du service d'aboutement de liaisons et de liaisons louées partielles, conduit à un prix supérieur à celui des liaisons Transfix de détail. Cette offre ne peut donc être utilisée par les opérateurs.
MFS expose que les tarifs des liaisons Transfix ne sont pas orientés vers les coûts et sont discriminatoires envers les opérateurs. Elle estime ainsi que :
- un grand client de France Télécom peut obtenir jusqu'à 19 % de remise au volume (15 % en moyenne), alors qu'un opérateur nouvel entrant ne bénéficie d'aucune réduction. De plus, MFS souligne que les pratiques de remises au volume sont antinomiques avec les règles de l'interconnexion ;
- France Télécom pratique également des remises en fonction de la durée des contrats sur les redevances mensuelles et sur les frais d'accès au service. Combinées avec les remises au volume, les réductions peuvent atteindre jusqu'à 40 % des prix de base des liaisons Transfix, ce qui constitue une première indication des coûts réels encourus par France Télécom ;
- une autre indication réside dans le tarif du service TFM 2048 offert uniquement à Paris. MFS considère que ce tarif pratiqué par France Télécom est dû, non à des coûts plus faibles à Paris, mais à la présence d'une concurrence effective sur cette zone géographique ;
- une comparaison des prix qu'elle paie en France, en Allemagne, en Suède et au Royaume-Uni, fourni en annexe VII de son mémoire, montre le prix excessif des liaisons louées françaises ;
- le modèle CMILT qu'elle a développé montre également que les tarifs Transfix sont au moins deux fois supérieurs aux coûts d'interconnexion ;
- le résultat est identique si on examine le niveau des tarifs par une approche sur l'évaluation de la marge (MFS estime que sa marge brute de revente doit être de 50 %, à l'instar du ratio retenu par l'Autorité dans sa décision no 2001-253 concernant le différend entre Liberty Surf et France Télécom) développée à l'annexe IV de son mémoire de saisine ;
- pour les liaisons à 34 et 155 Mbit/s, MFS soutient que les tarifs de Transfix HD, tels que pratiqués par France Télécom, sont trop élevés. Cette position se fonde sur la réalisation d'un test de squeeze avec les tarifs de Global ATM, qui révèle un effet de ciseau.
Au soutien de sa demande, MFS expose ensuite une évaluation du tarif orienté vers les coûts des liaisons louées par trois méthodes concourant, d'après elle, au même résultat :
1. Modèle CMILT de MFS et HAI Consulting développé à l'annexe IX de son mémoire de saisine ;
2. Méthode dite de la marge brute appliquée au tarif du service Transfix Métropolitain de France et au tarif des services Transfix HD (34 et 155 Mbit/s) en région parisienne qui sont 50 % moins chers dans les autres régions. MFS prend comme base de son raisonnement les tarifs en région parisienne, qui résultent non de coûts moindres, mais de l'existence d'une concurrence effective ;
3. Méthode de retail moins, cumulant 15 % de remise au volume, 15 % de remise longue durée et 20 % de coûts commerciaux évités (estimation de la Commission européenne).
Sur la demande relative à la qualité de service :
MFS indique que France Télécom a modifié unilatéralement les contrats Transfix de tous ses clients, y compris les opérateurs, en ce qui concerne les conditions de qualité de service. Les principales modifications relevées par MFS sont une baisse du montant des pénalités, un plafonnement inférieur, une réduction du nombre de cas où elles s'appliquent et, enfin, une moindre flexibilité générale des conditions de fourniture et de modification du parc de liaisons louées.
MFS estime que la baisse du montant des pénalités dues par France Télécom en cas de non-respect des conditions contractuelles risque d'amplifier le phénomène de baisse de qualité de service de France Télécom constaté récemment par MFS. MFS conteste ces modifications des conditions contractuelles sur le fond, puisqu'elles induisent une baisse de qualité de service, et sur la forme puisque France Télécom a procédé à une modification unilatérale des contrats, excluant toute négociation.
Ainsi, afin d'empêcher une discrimination entre le niveau de qualité pour les opérateurs tiers et pour les clients finals de France Télécom, MFS demande que l'offre d'interconnexion de liaisons louées pour les opérateurs inclut des pénalités déplafonnées et un système de reporting qu'elle décrit en annexe.
Vu la lettre du chef du service juridique de l'Autorité, en date du 24 août 2001, communiquant aux parties le calendrier prévisionnel de dépôt des mémoires et le nom des rapporteurs ;
Vu les observations en défense enregistrées à l'Autorité le 19 septembre 2001, présentées par la société France Télécom, RCS Paris no 380 129 866, dont le siège social est situé 6, place d'Alleray, 75505 Paris Cedex 15, représentée par M. Marc Fossier, directeur des relations extérieures ;
Préalablement à l'examen des arguments développés au fond par MFS, France Télécom :
- s'étonne que MFS n'ait pas saisi les occasions d'offres commerciales de France Télécom pour faire baisser ses coûts dans l'immédiat ;
- conteste la présentation de MFS des nouvelles conditions contractuelles des services Transfix ;
- nie les effets de ciseaux globaux entre ses offres Transfix et le service Multilan, sauf dans le cas « marginal et caricatural » présenté par MFS.
Sur la qualification juridique des liaisons louées demandées par MFS :
Dans ses observations, France Télécom souligne qu'une prestation de liaisons louées de courte distance ne relève pas du régime de l'interconnexion et que sa qualification ne saurait résulter de la présente procédure.
France Télécom indique qu'au titre de l'article L. 32 du code des postes et télécommunications, l'interconnexion est définie comme une prestation réciproque entre opérateurs permettant à l'ensemble des utilisateurs de communiquer entre eux. De cette définition, France Télécom conclut que :
- le destinataire de la prestation (opérateur plutôt que client final) n'entraîne pas de conséquence quant à la qualification juridique de cette prestation (interconnexion ou service de détail) ;
- l'absence de concurrence n'a également pas d'influence sur la nature juridique de la prestation.
France Télécom indique que MFS confond services de liaisons louées et services d'interconnexion de liaisons louées : au titre de l'article D. 99-9, la prestation d'interconnexion de liaisons louées est un service « d'accès au service de base : trafic commuté et liaisons louées pour les opérateurs L. 33-1 ».
Ainsi, France Télécom considère :
- d'une part, que le service d'aboutement de liaisons (reliant le Pop d'un opérateur au brasseur de France Télécom), inscrit à son catalogue d'interconnexion, relève de la définition de l'article D. 99-9 du code ;
- d'autre part, que le service de liaisons louées partielles (du brasseur de France Télécom au site du client de l'opérateur tiers), qui figure dans les conventions d'interconnexion, relève également de l'interconnexion au titre de la directive 97/33 et de l'interprétation qui en est faite dans le projet de recommandation de la Commission de novembre 1999.
En revanche, France Télécom estime qu'une prestation reliant directement le Pop de l'opérateur au site de son client ne constitue pas une prestation d'interconnexion.
De plus, France Télécom indique qu'elle n'a pas le pouvoir de distinguer le site d'un client ordinaire du Pop d'un opérateur qui constitue un site client comme un autre. Les liaisons louées à des opérateurs sont donc des liaisons fournies qui ne peuvent être vendues aux opérateurs dans des conditions privilégiées sans aller à l'encontre de l'obligation de non-discrimination à laquelle France Télécom est tenue. D'ailleurs, l'article D. 374 du code des postes et télécommunications ne fait pas référence à une utilisation des liaisons louées dans des conditions différentes de celles figurant aux articles L. 34 et suivants de ce même code.
Enfin, France Télécom soutient que la requalification juridique d'une prestation de nature commerciale en prestation d'interconnexion ne peut résulter d'un règlement de différend : elle ne peut que résulter d'une décision de l'Autorité dans le cadre des dispositions de l'article D. 99-16 du code pour laquelle France Télécom bénéficie d'un droit de recours devant le Conseil d'Etat.
France Télécom relève, en outre, que la prestation demandée par MFS ne figure pas à son catalogue d'interconnexion 2001, approuvé par l'Autorité. En conséquence, elle souligne que si l'Autorité faisait droit à la demande rétroactive de MFS pour l'année 2001, cela viderait de son sens la procédure d'approbation du catalogue d'interconnexion de France Télécom.
France Télécom déduit de l'ensemble de ces considérations que l'Autorité doit déclarer la demande de MFS irrecevable.
Sur la méthode d'évaluation des tarifs de MFS :
Par ailleurs, France Télécom estime que les arguments de MFS relatifs à la méthode d'évaluation des coûts et aux débits demandés ne sont pas pertinents. En effet, France Télécom souligne que la méthodologie de tarification retenue par MFS n'est pas cohérente avec la méthode d'évaluation des CMILT retenue par l'Autorité pour les travaux sur le dégroupage et pour le catalogue d'interconnexion pour 2002, qui impliquait un rapprochement entre un modèle top-down de France Télécom et un modèle bottom-up du secteur.
France Télécom remarque que les modélisations de type bottom-up ont une vertu pédagogique mais sont simplistes, alors que l'approche top-down constitue la méthode principale de détermination des CMILT.
De plus, France Télécom estime que la méthode bottom-up développée par MFS (et non par le secteur puisqu'il s'agit d'une modélisation propriétaire) aboutit à des tarifs irréalistes dus à des estimations de coûts trop basses, alors même que MFS reconnaît que les tarifs de boucle locale sont très élevés et alors que le mark-up de 10 % retenu par MFS présuppose une future réconciliation du modèle CMILT de l'Autorité. Les données de MFS reposent, en outre, sur un modèle adapté à la Californie dont les conditions de géographie physique et humaine sont très différentes de celles du territoire français.
France Télécom conteste également des éléments de la méthode de calcul de MFS pour les hauts débits, notamment le nombre de fibres par câble, la longueur moyenne de raccordement, le taux de mutualisation, les facteurs d'amortissement. France Télécom estime que le calcul sur ces éléments conduit à sous-estimer les coûts correspondants.
France Télécom conteste également plusieurs points de la méthode utilisée par MFS :
- le fait que ce soit les tarifs les plus bas qui soient considérés comme les plus représentatifs ;
- l'application d'un coefficient minorant de 50 % appliqué deux fois ;
- le fait que cette méthode apporte des résultats opposés pour les liaisons 2 Mbit/s, d'une part, et à 34 et 155 Mbit/s, d'autre part, alors que MFS en tire des conclusions identiques sur la pertinence de ses estimations. En outre, les résultats donnent des tarifs inférieurs à ceux figurant dans la recommandation de la Commission européenne.
France Télécom conteste plusieurs éléments du raisonnement de MFS pour l'évaluation des coûts des liaisons à des débits inférieurs à 2 Mbit/s, et notamment :
- le taux de remplissage de BPN utilisés par MFS, sans prendre en compte le taux de rendement ;
- la méthode du prorata pour établir les prix des liaisons par rapport aux prix des liaisons à 2 Mbit/s, sans prendre en compte les coûts fixes, indépendants des débits.
France Télécom estime, en ce qui concerne l'analyse d'effet de ciseaux entre les tarifs de Transfix HD et de Global ATM HD, que les deux offres comparées par MFS ne sont pas des offres exclusives à l'usage des opérateurs et qu'il n'y a pas lieu d'effectuer des tests d'effets de ciseaux, qui n'ont d'ailleurs pas été réalisés par l'Autorité dans le cadre de ses avis préalables à leur homologation par les ministres. Ces décisions d'homologation n'ont pas été contestées en justice.
Par ailleurs, France Télécom conteste le fait qu'un test d'effet de ciseau puisse être valablement réalisé à partir d'un exemple particulier et estime qu'il devrait être vérifié de manière globale.
Pour ce qui concerne les tarifs demandés de façon rétroactive pour l'année 2001, France Télécom conteste l'estimation de ses coûts par MFS pour 2001, comme étant équivalents aux tarifs de détail amputés de 50 %. France Télécom soutient que ce pourcentage de 50 % résulte d'une erreur de calcul de la part de MFS, pour le cumul des réductions au volume (15 %), à la durée (15 %) et des coûts commerciaux évités (20 %). Ce cumul ne correspond pas à la somme arithmétique de 50 %, mais à 42 %. Outre cette erreur factuelle, France Télécom considère que ce cumul de pourcentage n'a pas de réelle signification, ces valeurs de réductions n'étant pas indépendantes les unes des autres comme le soutient MFS.
Sur l'état du marché des liaisons louées :
Dans ses mêmes observations en défense, France Télécom conteste la nécessité pour MFS de disposer d'une offre de liaisons louées partielles à 34 et 155 Mbit/s de la part de France Télécom pour proposer des offres haut débit aux clients finals. En effet, en premier lieu, elle estime qu'une forte concurrence règne sur le marché des liaisons louées à haut débit.
France Télécom produit, à l'appui de son estimation, des extraits d'une étude réalisée par l'IDATE sur le marché des services à haut débit ainsi que des extraits d'une étude qu'elle a réalisée elle-même sur ce marché.
France Télécom souligne, en outre, ne pas disposer d'avantages comparatifs par rapport aux autres opérateurs en ce qui concerne le raccordement des sites qui nécessite de sa part, comme de la part des autres opérateurs, la construction d'infrastructures. France Télécom indique que seul un très faible nombre de ses clients est aujourd'hui raccordé à ses boucles optiques. France Télécom estime excessif de lui demander de construire des infrastructures pour le compte de ses concurrents, dès lors que MFS indique n'en avoir besoin que pour une durée de deux ans, ce qui est une durée trop courte sans commune mesure avec la durée des amortissements comptables.
En second lieu, France Télécom conteste l'analyse de MFS qui estime que les collectivités locales qui choisissent d'investir dans la construction de boucles optiques dépendent de France Télécom pour le raccordement des sites.
Sur la demande de tarifs rétroactifs de MFS :
France Télécom estime que l'Autorité ne saurait faire droit à la demande de MFS en ce qu'elle est rétroactive.
En effet, France Télécom soutient que faire droit à cette demande serait incohérent avec les dispositions contenues dans le catalogue 2001 d'interconnexion qui a pourtant été approuvé par l'Autorité. France Télécom estime qu'une telle demande contredirait un principe général du droit français, le principe de non-rétroactivité. Ce dernier est un principe général du droit reconnu, aussi bien en droit civil qu'en droit administratif, une loi ou un acte administratif ne pouvant par principe remettre en cause une situation juridique passée. Pour France Télécom, faire droit à la demande de MFS reviendrait à prononcer un jugement constitutif (création d'un nouveau produit d'interconnexion) avec effet rétroactif, ce qui est contraire au principe de non-rétroactivité. France Télécom demande donc à l'Autorité de rejeter la demande de rétroactivité de MFS.
En outre, France Télécom considère que la demande de rétroactivité conduirait l'Autorité à exercer une compétence qui n'est pas prévue par l'article L. 36-8 du code des postes et télécommunications. La rédaction de cet article ne permet pas à l'Autorité de se prononcer seulement pour l'avenir et non de remettre en cause des droits acquis. France Télécom appuie son argument sur un arrêt du Conseil d'Etat en date du 16 juin 2000. Elle précise que cet arrêt, bien que concernant une autre autorité réglementaire et une procédure régie par le droit public, ne modifie pas les termes du débat soulevé par la saisine de MFS.
France Télécom en conclut que l'Autorité doit rejeter la demande de MFS.
Sur l'offre d'interconnexion de liaisons louées faite au catalogue 2002 :
France Télécom estime que l'offre faite par France Télécom répond au besoin de MFS et considère dès lors qu'il y a lieu de rejeter la demande de cette dernière.
France Télécom annonce une offre de service d'interconnexion de liaisons louées dans son catalogue d'interconnexion pour 2002, ce qui répondra aux besoins justifiés des opérateurs.
Cette offre sera constituée par un service d'aboutement de liaisons à 2 et 155 Mbit/s, connectant le point de présence d'un opérateur à un brasseur de France Télécom situé dans la même zone de transit et d'une liaison louée partielle, de 64 kbit/s à 2 Mbit/s, reliant le brasseur au site du client de l'opérateur tiers (la demi-liaison est proposée dans la zone de couverture de chaque brasseur, ce qui permet d'établir des liaisons d'une longueur moyenne de 50 km), l'autre demi-liaison devant être fournie par l'opérateur à son client. Le service d'aboutement de liaison peut être remplacé par une offre de colocalisation. Les tarifs seront orientés vers les coûts pertinents de l'interconnexion.
Sur la qualité de service :
France Télécom considère que la demande de MFS sur le maintien de la qualité de service, figurant dans les conditions générales de vente antérieures au 1er juin 2001, ne relève pas de la compétence de l'Autorité ;
France Télécom considère que la demande de MFS concernant le maintien des conditions de qualité de service de ses offres de détail, antérieures à celles mises en oeuvre à compter du 1er juin 2001, relève de la confusion entre, d'une part, les offres d'interconnexion relevant des dispositions de l'article L. 36-8 et, d'autre part, les offres de détail qui n'en relèvent pas.
Elle considère que l'Autorité n'est pas compétente pour intervenir en ce qui concerne les évolutions des conditions générales d'abonnement à une liaison louée. En effet, les contrats de liaisons louées conclus entre France Télécom et les autres opérateurs relèveraient du régime juridique des prestations commerciales, distinct de celui de l'accès et de celui de l'interconnexion. La demande portant sur les conditions contractuelles des offres existantes ne peut donc être reliée à l'objet de la saisine ;
En outre, France Télécom rappelle que la modification des conditions de qualité de service figurant dans des contrats de liaisons louées a été réalisée par France Télécom, en conformité avec l'article 12.2 de ses conditions générales de vente, article qui est lui-même conforme aux dispositions de l'article D. 370 du code des postes et télécommunications ;
Par ces motifs, France Télécom demande à l'Autorité de rejeter l'ensemble des demandes de MFS.
Vu la lettre de la société MFS Communications, enregistrée à l'Autorité le 27 septembre 2001, demandant communication des pièces complémentaires évoquées dans les observations en défense de la société France Télécom, enregistrée à l'Autorité le 19 septembre 2001, et demandant un délai supplémentaire pour transmettre ses observations en réplique ;
Vu la lettre du chef du service juridique en date du 28 septembre 2001, accordant un délai supplémentaire aux parties pour transmettre leurs observations ;
Vu la lettre de la société France Télécom, enregistrée à l'Autorité le 2 octobre 2001, communiquant les pièces complémentaires évoquées dans leurs observations en défense enregistrées le 19 septembre 2001 ;
Vu la lettre de la société MFS Communications, enregistrée à l'Autorité le 3 octobre 2001, indiquant que les pièces complémentaires transmises par la société France Télécom le 2 octobre 2001 étaient incomplètes ;
Vu les observations en réplique de la société MFS Communications, enregistrées le 8 octobre 2001 ;
Dans ses nouvelles observations, MFS conclut aux mêmes fins que son précédent mémoire par les mêmes moyens que précédemment. Toutefois, MFS indique se ranger à l'analyse présentée par France Télécom dans ses observations en défense sur deux points, qui sont intégrés dans le présent mémoire :
- d'une part, sur la méthode de tarification des liaisons louées de moins de 2 Mbit/s ;
- d'autre part, sur la question des « faux PoPs » dont un opérateur déloyal pourrait se servir pour fausser la concurrence.
En outre, MFS note avec satisfaction que France Télécom ne conteste pas plusieurs points de sa saisine :
- la demande portant sur les conditions de reporting de la qualité de service ;
- la pertinence de la recommandation de la Commission sur la tarification des liaisons louées ;
- l'absence de concurrence sur le marché des liaisons louées en dehors de Paris-La Défense.
Par ailleurs, MFS constate que la nouvelle rédaction de l'article L. 34-8 du code des postes et télécommunications, issu de l'ordonnance du 25 juillet 2001, impose bien à France Télécom d'inclure une offre de liaisons louées dans son catalogue d'interconnexion, confirmant la décision de l'Autorité no 00-1328 susvisée.
MFS rappelle les trois composantes principales de sa saisine :
1. Demande transitoire :
Pour la période allant du 1er janvier 2001 au 31 décembre 2001, MFS demande à l'Autorité de fixer des conditions financières équitables : la tarification demandée est égale au prix public des liaisons Transfix (hors remises) diminuée de 50 %, en référence aux benchmarks européens et aux tarifs affichés par la recommandation de la Commission.
Pour la période postérieure au 31 décembre 2001, et jusqu'à la migration effective des liaisons existantes vers une offre d'interconnexion, MFS demande à l'Autorité de fixer les tarifs des liaisons louées au niveau des CMILT estimés par MFS, à la suite des corrections apportées au tableau figurant en page 4 du présent mémoire, augmenté d'un mark up de 10 %.
2. Demande définitive :
MFS demande à l'Autorité d'ordonner à France Télécom d'offrir un nouveau produit d'interconnexion répondant aux critères contenus dans l'annexe IX de son acte de saisine. Lorsque cette offre sera effectivement disponible, MFS s'engage à faire migrer l'ensemble des anciennes liaisons louées vers ces nouveaux services d'interconnexion. MFS demande également à ce que cette migration n'implique pas de charge financière supplémentaire. Les tarifs applicables sont ceux figurant dans l'annexe IX de l'acte de saisine.
Pour répondre à la bonne volonté manifestée par France Télécom dans son mémoire en défense, MFS renonce à certaines demandes figurant dans son mémoire de saisine, à savoir :
- le contrôle des tarifs, par l'Autorité, des liaisons louées dans leur configuration technique actuelle postérieurement à la mise en oeuvre effective par France Télécom de l'offre d'interconnexion de liaisons louées dans l'architecture décrite par MFS (annexe IX du mémoire de saisine) ;
- la tarification initialement demandée des liaisons d'un débit inférieur à 2 048 kbit/s, qui a été revue à la hausse pour répondre à des remarques de France Télécom sur le modèle CMILT de MFS.
Par ailleurs, MFS s'engage à mettre en place un mécanisme décrit à l'annexe VII du présent mémoire afin de garantir que ces liaisons relieront bien un de leurs points de présence au site de leurs clients et non deux sites de leurs clients.
3. Engagements de qualité de service :
MFS demande des engagements de qualité de service pour les liaisons de l'offre provisoire et définitive au moins équivalents aux engagements figurant dans l'offre Transfix avant les modifications du 1er juin 2001, avec des engagements de la part de France Télécom, pour l'offre définitive, tels que ceux figurant dans l'annexe IX de l'acte de saisine.
Sur la nature de la prestation de liaisons louées :
MFS conclut aux mêmes fins et par les mêmes moyens que précédemment. Elle estime qu'une prestation de liaison louée entre le site d'un client final et le point de présence de l'opérateur constitue une prestation d'interconnexion. MFS relève que France Télécom fournit déjà une prestation d'interconnexion pour les liaisons louées (liaisons louées partielles, dans le cadre des conventions d'interconnexion, complétées par des liaisons d'aboutement, dans le cadre du catalogue d'interconnexion), ce qui permet bien de relier un site client avec le PoP d'un opérateur. Même si aucun opérateur n'utilise à ce jour cette prestation, elle existe cependant.
MFS considère comme démentie dans les faits l'analyse de France Télécom, fondée sur l'article L. 32 du code des postes et télécommunications, selon laquelle toute prestation d'interconnexion constitue une prestation « réciproque » permettant aux utilisateurs de deux opérateurs de communiquer entre eux, notamment du fait que le catalogue d'interconnexion de France Télécom propose des services qui ne constituent pas des prestations « réciproques » (liaisons de sécurisation, services spéciaux, facturation pour compte de tiers,...).
Comprenant le souci économique de France Télécom de ne pas voir ses offres Transfix concurrencées de façon déloyale par des opérateurs qui relieraient deux sites de leurs clients par des liaisons achetées à France Télécom sous le régime de l'interconnexion, MFS propose une liste de critères, permettant de définir un PoP et garantissant que les liaisons relevant de l'interconnexion ne soient pas utilisées directement pour des offres de détail par les opérateurs.
Sur l'analyse tarifaire des prestations de liaisons louées, MFS estime que France Télécom n'apporte aucun élément pertinent permettant de remettre en cause le modèle CMILT HAI, à partir duquel ont été reconstitués les prix de détail de l'offre de détail de France Télécom pour les liaisons à 155 Mbit/s.
Sur l'absence de contradiction sérieuse des autres démonstrations économiques de MFS :
MFS estime que France Télécom ne conteste pas de façon sérieuse les autres démonstrations économiques de MFS :
- France Télécom rétablit seulement le calcul de la somme des remises applicables aux liaisons louées de détail, qui se monte à 42 % et non à 50 % comme l'avance MFS ;
- France Télécom considère que le ratio de 20 % du chiffre d'affaires pour les coûts commerciaux évités paraît élevé, sans apporter d'élément à l'appui de cette affirmation ;
- France Télécom ne donne pas d'information sur le prix de TFM 2048 qui est 50 % moins cher que les autres liaisons louées de même débit et même longueur ;
- France Télécom ne donne pas d'explication sur la possibilité de réaliser des réductions de coût pour les liaisons de courte distance dans la région parisienne, compte tenu des coûts élevés du génie civil et de l'immobilier dans cette zone géographique, que MFS ne s'explique que par la pression concurrentielle existante.
D'après MFS, les textes réglementaires relatifs à l'interconnexion ont pour objet de permettre, en période d'ouverture à la concurrence, d'atteindre des prix tels qu'ils se situeraient en situation de concurrence effective. C'est pourquoi MFS considère que les prix pratiqués par France Télécom, notamment pour TFM 2048 à Paris, zone sur laquelle existe une concurrence, constituent une bonne indication du niveau des coûts réels de France Télécom. MFS considère donc que le prix de TFM, amputé des coûts pertinents évités, confirme le bien-fondé de la demande de MFS, visant à une réduction de 50 % pour les liaisons de courte distance ;
MFS rappelle que la recommandation de la Commission de novembre 1999 déterminait des prix plafond et qu'elle devait être mise en oeuvre avant le 31 décembre 2001 ;
Enfin, à l'appui de ces nouvelles observations, MFS produit de nouvelles comparaisons internationales, à la suite des décisions récentes des régulateurs italien et britannique ; ces comparaisons ont été faites pour les liaisons de 5 kilomètres, sur des contrats de 3 ans et en incluant les frais d'accès au service. D'après ces comparaisons, les prix de France Télécom se rapprochent, dans les zones où il existe de la concurrence, de ceux pratiqués en Italie, Allemagne, Royaume-Uni et Suède, notamment pour les liaisons à 2,34 Mbit/s, même s'ils restent supérieurs aux prix recommandés par la Commission et aux prix résultant du modèle CMILT HAI de MFS. En revanche, ces prix sont très supérieurs dès lors que l'on se situe dans les régions autres que Paris ;
MFS corrige une erreur qui s'était glissée dans son mémoire de saisine sur le tarif des liaisons louées Transfix 155 Mbit/s en province (dernier graphe de l'annexe IV) : une erreur de longueur (1 kilomètre au lieu de 5) a conduit à minorer le prix de ce type de liaison. Un nouveau graphe est fourni.
Sur l'effet de ciseau tarifaire provoqué par Global ATM HD :
MFS estime que France Télécom ne remet pas en cause l'existence d'un tel effet de ciseau démontré par MFS à l'annexe III de sa saisine initiale, mais conteste le fait qu'un test de ciseau puisse être valablement réalisé sur un seul cas et non pas de manière globale ;
MFS rappelle, d'une part, que les règles de la concurrence s'appliquent même aux cas isolés, comme vient de le démontrer le Conseil de la concurrence dans l'affaire Renault, et, d'autre part, que la démonstration prouvait qu'aucun autre opérateur n'aurait pu pratiquer des tarifs similaires à ceux de Global ATM HD, du fait du niveau des tarifs des liaisons louées d'extrémité.
Sur la méthode de détermination des tarifs de liaisons louées à moins de 2 Mbit/s :
MFS prend en compte la position de France Télécom, pour les liaisons à moins de 2 Mbit/s, considérant le coût non strictement proportionnel au débit. En conséquence, MFS propose, en annexe IV, une méthode plus adaptée que celle avancée précédemment.
Sur l'analyse du marché :
MFS estime infondé le moyen soulevé par France Télécom considérant qu'elle n'est pas tenue d'offrir une prestation d'interconnexion pour des débits supérieurs à 2 Mbit/s, France Télécom ne se considérant pas comme puissante sur ce marché.
Sur les analyses juridiques diverses de France Télécom :
MFS soutient que sa demande ne vise pas à modifier les tarifs de détail des liaisons louées Transfix de France Télécom, mais à fixer les tarifs d'une prestation entre opérateurs relevant de l'interconnexion et des compétences de l'Autorité, au titre des articles L. 34-8 et L. 36-8 du code des postes et télécommunications ;
MFS n'a pas renoncé à ses droits d'opérateur en achetant des liaisons Transfix (d'ailleurs auprès de la DIVOP de France Télécom) : elle y a été conduite par le refus de France Télécom de fournir des liaisons louées à un tarif orienté vers les coûts, conformément à la décision no 2000-1328 de l'Autorité en date du 15 décembre 2000 qui désigne France Télécom comme opérateur puissant sur le marché des liaisons louées. Dans sa réponse, France Télécom n'a pas contesté la réalité de l'échec des négociations.
Par ailleurs, MFS soutient que rien ne s'oppose à ce que l'Autorité fixe des conditions financières pour une prestation déjà fournie, en se fondant sur les décisions de l'Autorité no 2000-947 (règlement de différend entre Bouygues Télécom et France Télécom) et no 2000-489 (règlement de différend entre 9 Télécom et France Télécom). Elle considère que la rétroactivité est en outre prévue par l'article 7-3 de la directive 97/33 relative à l'interconnexion.
L'arrêt du Conseil d'Etat no 202835 du 16 juin 2000 produit aux débats par France Télécom ne traite pas de la rétroactivité des décisions mais confirme la compétence d'une autorité réglementaire (à l'époque, le ministre chargé des postes et télécommunications) pour fixer le tarif d'une prestation de liaisons louées entre opérateurs, considérée comme une prestation d'interconnexion.
MFS estime que l'offre de France Télécom, présentée dans ses observations en défense, ne répond pas à sa demande pour quatre raisons :
- le point d'interconnexion déterminé par France Télécom est le siège des brasseurs et non le PRO ;
- les débits ne sont pas ceux demandés par MFS ;
- les engagements de qualité de service sont insuffisants ;
- les tarifs ne sont pas indiqués, non plus que leur mode de calcul (à « vol d'oiseau ou non »).
De plus, les conditions de migration des liaisons louées actuellement utilisées par MFS vers la nouvelle offre d'interconnexion ne devraient pas faire encourir de charges financières supplémentaires à MFS.
MFS considère sa demande raisonnable, en termes de prestation et de tarifs, puisqu'elle correspond aux obligations découlant de la réglementation en vigueur.
Sur la qualité de service :
MFS estime infondé le moyen soulevé par France Télécom tiré de l'incompétence de l'Autorité pour se prononcer sur les engagements de qualité de service des liaisons louées fournies par France Télécom dans le cadre de l'interconnexion. MFS se fonde sur l'article 9-3 de la directive 97/33 qui cite explicitement « le maintien de la qualité de service de bout en bout » parmi les sujets sur lesquelles peuvent se prononcer les autorités réglementaires nationales. Toutefois, MFS reconnaît la complexité du sujet (fixation de critères de performances associées à des pénalités). C'est pourquoi elle demande une solution simple qui est le maintien des conditions générales de ventes de Transfix, telles qu'elles ressortent des contrats signés antérieurement au 1er juin 2001, dans l'attente d'une solution qui serait négociée dans un cadre multilatéral.
MFS considère que France Télécom est infondée à modifier unilatéralement les conditions générales de vente en matière de qualité de service notamment, même dans ses contrats vis-à-vis des utilisateurs finals, car cela ne concerne pas les cas prévus à l'article 12-2 de ces conditions générales, qui visent les modifications des « conditions d'exploitation ou d'organisation des réseaux » ;
MFS constate que France Télécom ne conteste pas la mise en place d'un système de reporting, résumé à l'annexe IX du présent mémoire, dont le but est de prévenir toute discrimination entre l'opérateur historique, ses filiales et services, qui sont en concurrence directe avec MFS sur le marché des services de transmission de données pour les entreprises.
Vu la lettre de la société France Télécom, enregistrée à l'Autorité le 10 octobre 2001, concernant les pièces complémentaires enregistrées le 2 octobre 2001 ;
Vu la lettre de la société France Télécom, enregistrée à l'Autorité le 18 octobre 2001, demandant un délai supplémentaire pour transmettre ses nouvelles observations en défense ;
Vu la lettre du chef du service juridique, en date du 19 octobre 2001, fixant au 25 octobre 2001 la date de remise de ses nouvelles observations en défense ;
Vu les secondes observations en défense de la société France Télécom, enregistrées le 25 octobre 2001 ;
France Télécom conclut aux mêmes fins par les mêmes moyens que dans son précédent mémoire.
Concernant la mise en place rétroactive d'un nouveau produit d'interconnexion, France Télécom indique que MFS ne peut demander de bénéficier de façon rétroactive des services qui n'ont pas été fournis par le passé. La situation est donc différente de celles auxquelles MFS fait référence puisque, dans les décisions mentionnées, il s'agissait de modifier, pour le passé, des tarifs de prestations d'interconnexion déjà fournies pendant la période concernée par la demande de rétroactivité.
France Télécom souligne que MFS n'a pas souscrit dans le passé aux prestations d'interconnexion de liaisons louées proposées par France Télécom dans le cadre du catalogue (liaisons d'aboutement) et des conventions d'interconnexion (liaisons louées partielles), mais a préféré souscrire des contrats de liaisons Transfix.
France Télécom considère qu'il serait difficilement admissible que MFS demande, par le biais d'un règlement de différend, de corriger les effets de ses propres choix techniques et commerciaux. France Télécom souligne que MFS aurait pu demander plus tôt à l'Autorité de trancher la question, afin de ne pas adhérer à une offre commerciale de France Télécom, ou bien aurait pu demander des mesures d'urgences. France Télécom considère que l'Autorité ne pourrait donner un effet rétroactif à sa décision pour des raisons de sécurité juridique.
France Télécom souligne que ses propositions répondent aux besoins de MFS, notamment en ce que les liaisons d'aboutement, permettent de couvrir l'ensemble d'une zone de transit et, par conséquent, de couvrir tous les clients de cette zone à partir d'un seul point de présence.
Les débits qui ne sont pas proposés par France Télécom dans le cadre de ses propositions sont les liaisons louées partielles à 34 et 155 Mbit/s. France Télécom renvoie à son précédent mémoire pour conclure qu'elle n'est pas tenue de fournir ces liaisons dans le cadre de l'interconnexion.
France Télécom estime, sur la qualité de service, que les engagements proposés dans le cadre du catalogue constituent des engagements de base, mais que ceux-ci pourront être renforcés dans le cadre de conventions librement négociées, afin de déterminer, liaison par liaison, le niveau de qualité requis.
France Télécom demande donc à l'Autorité de renvoyer les parties à la négociation sur l'offre qui figurera au catalogue d'interconnexion pour l'année 2002.
Sur la mise en oeuvre du reporting, France Télécom soutient que la demande de MFS portant sur un suivi trimestriel par opérateur, service ou filiale de FT, ne donnera pas des résultats comparables, les offres souscrites pouvant différer ainsi que les politiques d'achats.
En conséquence, France Télécom propose un reporting global (moyenne et écart type) sur ses clients, sur douze mois glissants. Sur les indicateurs proposés par MFS, France Télécom les reprend point par point en soulignant leurs lacunes, notamment parce que les cas d'erreurs (retards, panne, ponctualité) non imputables à France Télécom devraient en être exclus.
France Télécom précise de plus qu'elle propose déjà dans les contrats Transfix des options de reporting, appelées « responsable service client » et « tableau de bord de production », MFS ayant souscrit à la première. Elle est disposée à fournir aussi une telle offre dans le cadre des liaisons louées partielles mais note que cette offre ne pourra qu'être optionnelle, tous les clients ne souhaitant pas y souscrire, et qu'elle aura nécessairement un coût.
Sur la méthode de détermination des tarifs :
France Télécom souhaite, d'une part, revenir sur certains points méthodologiques des analyses de MFS et, d'autre part, apporter des explications sur l'analyse erronée, produite par MFS, du tarif de TFM 2048.
France Télécom note que MFS affirme dans son second mémoire avoir besoin de liaisons louées d'interconnexion pour de nombreuses années, à la différence des deux ans avancés dans sa saisine. France Télécom s'étonne de devoir investir sur le long terme dans sa boucle locale pour le compte des autres opérateurs.
France Télécom conteste le fait que le modèle de MFS reflète « l'état de l'art en matière de modélisation économique », puisqu'il s'agit d'un modèle « bottom-up » dont les économistes reconnaissent les limites. De plus, il ne s'agit pas d'un modèle « du secteur », mais d'un modèle propriétaire.
France Télécom affirme accepter la confrontation des modèles économiques, contrairement à ce qu'affirme MFS, puisqu'elle l'a déjà fait dans le cadre de l'interconnexion et du dégroupage de la boucle locale, sous l'égide de l'Autorité.
Le fait que MFS considère le prix de TFM 2048 comme représentatif des coûts des autres liaisons louées à 2 Mbit/s constitue, selon France Télécom, une erreur d'interprétation. Il s'agit d'une offre répondant à des critères d'éligibilité précis, influant sur les conditions économiques de l'offre (notamment un débit global par site de 8 Mbit/s), entraînant des économies d'échelles que ne connaissent pas des liaisons louées à 2 Mbit/s isolées. Quant au prix du génie civil en région parisienne, il est effectivement plus élevé que dans des zones moins denses, mais la forte concentration de la demande entraîne également de fortes économies d'échelles, constat classique de toute économie de réseaux.
Sur l'analyse du marché :
France Télécom conteste l'analyse concurrentielle du marché des liaisons louées à haut débit produite par MFS.
En outre, France Télécom considère qu'aucun texte ne prévoit qu'un opérateur puisse être contraint à installer de la fibre optique pour compte de tiers. Au contraire, la recommandation de la commission ne fait référence qu'à des services dont le support n'est pas nécessairement de la fibre optique. France Télécom indique que c'est pour cette raison qu'elle ne propose pas de service à 34 Mbit/s dans son projet d'offre au catalogue d'interconnexion, puisqu'elle ne fournit des liaisons à 34 Mbit/s que sur des supports en fibre optique.
France Télécom précise que le règlement de la Commission sur le dégroupage exclut le dégroupage de la fibre optique, ce à quoi revient la demande de MFS.
Sur les conditions contractuelles applicables aux liaisons louées Transfix :
France Télécom soutient que l'Autorité ne pourrait, sans méconnaître les règles du code des postes et télécommunications, fixer les conditions de migration des liaisons louées commerciales, ressortissant à des conditions contractuelles entre les parties, vers le service d'interconnexion proposé par France Télécom.
Vu la lettre de la société MFS Communications, enregistrée à l'Autorité le 31 octobre 2001, concernant les pièces complémentaires évoquées dans les observations en défense de la société France Télécom enregistrées à l'Autorité le 19 septembre 2001 ;
Vu la décision no 2001-1054 de l'Autorité, en date du 7 novembre 2001, prorogeant le délai dans lequel l'Autorité doit se prononcer ;
Vu la lettre du chef du service juridique, en date du 28 novembre 2001, adressant un questionnaire aux parties et fixant au 12 décembre 2001 la date de clôture de remise des réponses ;
Vu la lettre de la société France Télécom, enregistrée à l'Autorité le 10 décembre 2001, demandant une semaine supplémentaire pour transmettre ses réponses au questionnaire du rapporteur ;
Vu la lettre du chef du service juridique, en date du 10 décembre 2001, fixant au 19 décembre 2001 la date de clôture de remise des réponses au questionnaire ;
Vu la décision no 2001-1196, en date du 12 décembre 2001, prorogeant le délai dans lequel l'Autorité doit se prononcer sur le différend opposant MFS Communications à France Télécom ;
Vu les réponses de France Télécom et de MFS Communications au questionnaire du rapporteur, enregistrées le 19 décembre 2001 ;
Vu la lettre de la société MFS Communications, enregistrée à l'Autorité le 17 janvier 2002, faisant part à l'Autorité d'une décision du régulateur britannique (OFTEL) ;
Vu la lettre en date du 16 janvier 2002 de la société France Télécom, enregistrée à l'Autorité le 18 janvier 2002, concernant une erreur dans sa réponse au questionnaire du rapporteur ;
Vu la lettre du chef du service juridique, en date du 21 janvier 2002, convoquant la société France Télécom et MFS Télécommunications à une audience devant le collège le 5 février 2002 ;
Vu la lettre de la société MFS Communications, enregistrée à l'Autorité le 31 janvier 2002, n'émettant pas d'objection à ce que l'audience devant le collège soit publique ;
Vu la lettre de la société France Télécom, enregistrée à l'Autorité le 4 février 2002, souhaitant que l'audience devant le collège ne soit pas publique ; interrogée sur ce point par le président de l'Autorité à l'ouverture de l'audience, la société MFS Communications a précisé qu'elle pouvait souscrire à la demande de France Télécom ;
Après avoir entendu, le 5 février 2002, lors de l'audience devant le collège :
- le rapport de Mmes Françoise Laforge et Elodie Ziegler, rapporteur et rapporteur adjoint, présentant les moyens et les conclusions des parties ;
- les observations de MM. Thomas Marten et Laurent Papiernik, pour la société MFS Communications ;
- les observations de MM. Marc Fossier et Jean-Daniel Lallemand, pour la société France Télécom ;
En présence de :
- M. Jean Marimbert, directeur général, Philippe Distler, François Lions, Loïc Taillanter, Mmes Elisabeth Rolin, Cécile Dubarry, Christine Galliard, agents de l'Autorité ;
- M. Lionel Drouin, Mme Françoise Ceailles, pour la société MFS Communications, assisté de Me Winston Maxwell, cabinet Carridi, Mee, Rué ;
- MM. Jean Mazier, Christian Gacon, Mmes Aurélia David, Evelyne Glickmann, pour la société France Télécom ;
Le collège en ayant délibéré le 12 février 2002, hors la présence du rapporteur, du rapporteur adjoint et des agents de l'Autorité.
3. Sur la demande de MFS relative à la définition d'une offre d'interconnexion de liaisons louées spécifiques aux opérateurs
France Télécom ayant au cours de la procédure avancé une nouvelle offre de liaisons louées d'interconnexion pour les débits inférieurs ou égaux à 2 Mbit/s, il convient de traiter séparément le cas des liaisons à 34 et 155 Mbit/s.
4. Sur la demande de MFS relative aux liaisons louées Transfix souscrites dans l'attente d'une offre d'interconnexion spécifique aux opérateurs
MFS demande à l'Autorité de déterminer, pour tous les débits de liaisons, un tarif orienté vers les coûts pertinents pour l'interconnexion, pour les liaisons louées qu'elle a souscrites auprès de France Télécom dans le cadre de contrats Transfix, dans l'attente de la mise en oeuvre effective, par France Télécom, d'une prestation d'interconnexion de liaisons louées reposant sur une architecture adaptée à des relations entre opérateurs.
MFS justifie sa demande du fait, d'une part, de l'absence d'une offre d'interconnexion à des tarifs orientés vers les coûts et, d'autre part, du délai nécessaire à la mise en place effective de prestations d'interconnexion de liaisons louées spécifiques aux opérateurs.
France Télécom indique qu'elle proposait en 2001 une prestation d'interconnexion de liaisons louées constituée d'une offre de service d'aboutement de liaisons inscrites à son catalogue d'interconnexion et d'une offre de liaisons louées partielles proposées dans ses conventions d'interconnexion. Elle souligne également que le fait que MFS ait conclu avec France Télécom des contrats pour des offres de détail Transfix, dans les conditions de son catalogue de détail pour les clients finals, relève d'un choix propre à MFS. Elle fait enfin valoir que si MFS n'était pas satisfaite de cette solution, rien ne l'empêchait de saisir l'Autorité à une date antérieure à sa saisine, et, éventuellement, d'assortir cette saisine d'une demande de mesures conservatoires.
Art. 1er. - France Télécom devra proposer à MFS une offre d'interconnexion en application du chapitre VIII du catalogue d'interconnexion 2002, en vue de la signature d'une convention au plus tard le 30 septembre 2002. Cette convention devra également intégrer une offre permettant à MFS de recueillir les liaisons louées partielles en dehors de la zone de couverture où se situe le client, telle que définie dans le catalogue d'interconnexion 2002.
Art. 2. - France Télécom devra proposer à MFS une offre d'interconnexion de liaisons louées adaptée aux relations entre opérateurs pour les liaisons de débits de 34 et 155 Mbit/s, en vue de la signature d'une convention au plus tard le 31 décembre 2002. Lorsque MFS dispose d'une infrastructure en propre utilisable pour la liaison louée considérée ou lorsque France Télécom lui propose le partage des fourreaux desservant un client dans un délai et à des tarifs raisonnables, France Télécom pourra refuser de satisfaire une demande d'interconnexion de MFS. France Télécom pourra également refuser de satisfaire une demande d'interconnexion de MFS si des contraintes techniques objectives l'y obligent. France Télécom devra prévoir ces cas de difficultés particulières dans sa convention, qui seront conformes à celles identifiées dans le cadre des contrats Transfix HD.
Art. 3. - France Télécom ne facturera à MFS ni frais de migration, ni frais d'accès au service, lorsque la migration d'une liaison de type Transfix vers une liaison louée issue de la nouvelle offre d'interconnexion a lieu avec une coupure de service. Les conditions de cette coupure de service seront négociées entre les parties dans le cadre de leur convention d'interconnexion. France Télécom pourra cependant facturer les coûts relatifs à la construction d'une nouvelle liaison dans le cas où MFS demande une migration sans coupure de service. Les frais, dans ce cas, ne pourront être supérieurs aux frais d'accès au service.
Art. 4. - France Télécom proposera, dans sa convention d'interconnexion, des conditions de qualité de service au moins égales à celles des contrats Transfix en cours. France Télécom devra y inclure, lorsque MFS le demande, l'ensemble des options de qualité de service disponible dans le cadre des contrats Transfix en cours, à des prix inférieurs ou égaux à ceux des contrats Transfix. Les pénalités associées seront égales à celles proposées dans les contrats Transfix et un éventuel plafond de pénalités ne pourra pas être inférieur à celui prévu par le catalogue d'interconnexion. Un système de suivi de la qualité de service sera négocié entre les parties et ajouté à leur convention d'interconnexion.
Art. 5. - A compter de la date de la présente décision et jusqu'à ce que les parties aient conclu une convention d'interconnexion et se soient accordées sur les liaisons de type Transfix que MFS souhaite faire migrer vers la nouvelle offre d'interconnexion définie dans la présente décision, c'est-à-dire jusqu'au 30 septembre 2002 au plus tard pour les liaisons jusqu'à 2 Mbit/s et jusqu'au 31 juillet 2003 pour les liaisons à 34 et 155 Mbit/s, France Télécom devra appliquer pour les liaisons louées de MFS un tarif égal, au plus, aux tarifs de base inscrits à son catalogue en vigueur au moment de la facturation, amputés de 27 % pour ce qui concerne à la fois les redevances mensuelles et les frais d'accès au service. Cette remise est applicable au plus tard jusqu'au 30 septembre 2002 pour les liaisons de débits inférieurs ou égaux à 2 Mbit/s et jusqu'au 31 juillet 2003 pour les liaisons de 34 Mbit/s et 155 Mbit/s. Si les réductions obtenues par MFS auprès de France Télécom, en vertu des contrats conclus dans le cadre antérieur à la présente décision de règlement de différend, étaient supérieures à celles déterminées ci-dessus, France Télécom devra appliquer le meilleur des deux tarifs.
Art. 6. - France Télécom devra appliquer, dès lors que les parties auront conclu une convention d'interconnexion et se seront accordées sur les liaisons de type Transfix que MFS souhaite faire migrer vers la nouvelle offre d'interconnexion définie dans la présente décision, une tarification fondée sur l'application anticipée du prix des liaisons louées définies dans cette offre, même si la migration effective n'a pas eu lieu. La sortie des contrats Transfix en cours ne devra pas donner lieu à des pénalités si la durée restante du contrat est reportée sur la nouvelle convention d'interconnexion pour laquelle la durée minimale de souscription est d'un an.
Art. 7. - France Télécom devra appliquer aux contrats Transfix de MFS, pendant les périodes transitoires définies à l'article 5 ci-dessus, les conditions de qualité de service et de pénalités identiques à celles de la nouvelle prestation d'interconnexion.
Art. 8. - Le surplus des conclusions présentées par les sociétés MFS et France Télécom est rejeté.
Art. 9. - Le chef du service juridique ou son adjoint est chargé de notifier aux sociétés MFS et France Télécom la présente décision, qui sera rendue publique sous réserve des secrets protégés par la loi.
Fait à Paris, le 12 février 2002.
... Passages relevant des secrets des affaires.